Les poissons volants de Naïm – suite

Fayçal remarqua que le soleil montait dans le ciel et se hâta vers sa barque, calant le panier, dans lequel le bébé dormait toujours, sur sa hanche.

Il eut de la chance, ce matin-là. Avant midi, il avait réussi à attraper cinq gros poissons volants, ce qui était plus que suffisant pour la journée. Souriant, pour la première fois depuis plusieurs semaines, de cette pêche miraculeuse, il regagna la plage, tira sa barque sur le sable puis repartit au village avec ses poissons et le panier contenant le bébé.

Le nourrisson s’était réveillé sur le chemin et pleurnichait de plus en plus fort. Le temps qu’il arrive chez lui, l’enfant hurlait à pleins poumons. Fayçal s’affola et courut toquer à la porte de Zeïnab, sa voisine. Zeïnab, qui vivait seule, ne se comportait pas avec lui comme les autres villageois.  Elle ne cherchait pas spécialement à entrer en relation avec lui mais elle ne l’évitait pas. Au contraire, elle saluait à chaque fois qu’elle le croisait.

Elle mit du temps à répondre et il craignit qu’elle soit toujours au marché où elle vendait des beignets. Quand elle ouvrit enfin, il bafouilla à toute vitesse qu’il avait besoin de son aide, qu’il avait trouvé un bébé sur la plage et qu’il pleurait, qu’il ne s’arrêtait plus de pleurer et que si elle l’aidait, il lui donnerait deux des poissons qu’il avait pêchés. Zeïnab le fit entrer avec son panier, prit l’enfant qui était devenu rouge écarlate à force de vagir, sentit sa couche, sourit et expliqua à Fayçal qu’il avait besoin d’être changé. Elle prit un linge dans le panier, le déplia, l’examina, puis satisfaite, se mit à l’œuvre.

Lorsqu’elle enleva sa couche, ils virent que le bébé était un petit garçon. La voix du petit chevrotait, il semblait ne plus avoir d’énergie mais il ne cessait de pleurer. Fayçal regardait attentivement comment sa voisine s’y prenait pour changer le bébé. Quand elle eut fini, elle le lui tendit. Il s’en saisit et aussitôt, le bébé cessa de pleurer, se blottissant contre la poitrine du vieil homme. Serrant le bébé qu’instinctivement il se mit à bercer, il tendit à Zeïnab les deux poissons qu’il lui avait promis. Elle s’en saisit et alors qu’il s’apprêtait à partir, elle lui demanda d’attendre et partit farfouiller dans un coin de sa cahute. Elle revint avec une outre et dit à Fayçal qu’elle contenait du lait. Pour le bébé, expliqua-t-elle. Il était trop jeune pour manger de la nourriture solide et il faudrait le nourrir au lait pendant quelques temps. Après, il faudrait passer à de la bouillie et seulement ensuite à autre chose de plus consistant. Fayçal la remercia chaleureusement puis rentra chez lui. Il fit chauffer le lait et le donna au bébé qui le but goulûment.

A l’abri des regards dans sa cabane, Fayçal se mit à fredonner une petite comptine que lui chantait sa mère lorsqu’il était petit. Il était étonné de s’en souvenir aussi bien et au bout de quelques minutes, ne se sentant plus ridicule, il se mit à chanter les paroles. L’enfant ne le quittait pas des yeux et finit par s’endormir, bercé par la voix profonde de Fayçal. Le vieil homme regarda longuement l’enfant dormir, attendri malgré lui par l’innocence de ce tout petit être. Il se demanda ce qu’il devait faire. Peut-être que ses parents étaient revenus le chercher sur la plage ? A l’heure qu’il était, ils étaient peut-être désespérément à la recherche de leur petit garçon. Il ne pouvait pas le garder avec lui, il fallait qu’il le rende à ses parents. Et puis de toute façon, il était bien trop vieux pour s’occuper d’un enfant. Il ne l’avait jamais fait, il était bien trop tard pour qu’il apprenne, maintenant. Il se dit que s’il ne trouvait pas les parents du garçonnet tout de suite, il le confierait à Zeïnab. Elle saurait s’y prendre, elle. Beaucoup mieux que lui.

Le bébé s’agita dans son sommeil et se mit à pleurer doucement, les yeux toujours clos. Lui caressant précautionneusement la joue, Fayçal s’avoua qu’en à peine quelques heures, il s’était attaché au petit garçon. Il était si mignon, si serein et il paraissait si confiant dans ses bras. Ah comme il aurait aimé avoir un fils, un fils qui aurait ressemblé à ce bébé. Il secoua la tête pour chasser ces pensées douloureuses et dangereuses. Le bébé s’était rasséréné et dormait à nouveau profondément. Fayçal nettoya ses poissons, se fit à manger puis rangea sa cabane. S’allongeant sur son lit près duquel il avait placé le panier contenant le bébé, il attendit patiemment que ce dernier se réveille.

A suivre…

4 thoughts on “Les poissons volants de Naïm – suite

  1. Alors ca, c’est vraiment pas cool!!
    Nous on joue le jeu en prenant soin de ne pas faire défiler l’écran trop vite pour garder la surprise et là nacash! J’espère que le jeu en vaut la chandelle et qu’on va être blueffé en voyant ta future création…

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