Pamela et moi

Dans ma prime jeunesse (hier quoi), j’ai copieusement détesté C.J Parker parce qu’elle avait d’énormes seins. Et aussi parce qu’ils ne bougeaient pas quand elle sprintait sans soutien-gorge sur la plage.
Tu sais qui est C. J. Parker, n’est-ce pas coupine?
C. J Parker.
Cascade de cheveux blonds, beaucoup (trop) de monde au balcon, ventre archi-plat, toujours en maillot rouge et jamais sans sa bouée. Tu situes ?

Voilà ! C. J. c’était Pamela Anderson dans Alerte à Malibu (ça, je ne te demande pas, tu connais forcément ! Même Charming connaît)(et Dieu sait que dans sa jeunesse, ses parents ont été intraitables sur la question des séries américaines à faible apport intellectuel).

Robe Pam (Fiat Lux) en taille 38 (pour un 38 du commerce)
jersey rayé gris-bleu (mon stock)
fil mousse (mon stock)

Pamela et ses bouées m’ont donc sérieusement gonflée au cours des étés désœuvrés de mon adolescence (Dieu sait aussi que mes parents étaient des gens détendus qui donnaient leur chance à toutes les séries, du moment qu’il n’y avait pas de scènes de sexe dedans)(du coup, j’ai une connaissance étendue de toutes les séries du dimanche aprèm sur TF1). Pamela m’a distraite à chaque épisode mais elle m’a surtout terriblement agacée. Entre deux discussions à cœur ouvert avec ses collègues, pas mal faits de leur personne non plus d’ailleurs, elle se ruait sur sa bouée et courait, cheveux au vent, au secours d’un malheureux qui buvait la tasse au large. Elle le sauvait (bien évidemment) et tout était bien qui finissait bien (limite sur un grand fou-rire collectif). Sauf que ses seins, comprimés dans son maillot rouge, ne bougeaient jamais pendant toutes ces opérations. Je ne l’ai jamais vue grimacer de douleur. Et puis sa crinière non plus ne souffrait jamais de ses sauvetages. Même mouillée, elle restait aussi savamment distribuée autour de son visage lisse au nez mutin et aux lèvres généreuses.

Je sais bien que c’était une série, qu’elle ne courait pas si vite et qu’une coiffeuse venait s’occuper de ses cheveux entre deux prises. Je sais bien que c’était sans doute en grande partie grâce à cette étonnante plastique qu’elle était là, à sauver le chaland à Malibu. Mais quand même, je l’ai profondément haïe.

Pamela, c’était un ovni, une bombe. Avec ses énormes lolos et sa tête de lionne, on aurait dit une caricature de femme. Et je lui en voulais d’être ce fantasme ambulant, d’avoir modifié son corps pour coller à une image que je jugeais dégradante pour la femme. Bon peut-être que j’étais aussi un peu envieuse (rapport à mon petit bonnet B) mais si on va par là (moi, ma poitrine, l’injustice de la génétique), on en a pour vingt pages de plus alors restons sur Pamela.

Avec le temps, j’ai changé de position. « Qui veut une plastique parfaite n’est jamais vraiment à la fête » comme dirait l’autre (moi).

Autrement dit, j’ai compris, Pamela (oui, Pam, c’est à toi que je m’adresse, sois sans crainte, je ne te juge plus aujourd’hui), que tu étais une femme malheureuse. J’ai compris que tu avais dû beaucoup l’être pour te payer cette prodigieuse paire d’implants mammaires. Et que tu avais dû aussi beaucoup souffrir à cause d’eux.
Aujourd’hui, tu vois, je ne te condamne plus. C’est certes un peu tard mais je vois enfin au-delà de ton image, je vois enfin qu’il y a une femme derrière les montagnes (no offense, c’est juste une image).

Ces seins, Pamela, ces énooormes seins, c’est une barrière que tu as érigée entre le monde et toi n’est-ce pas ? Un genre de carapace pour qu’on ne te fasse plus de mal, pour qu’on t’aime ?

Ah là là, ma pauvre Pamela, quel dommage que la vie ne nous aie pas rapprochées (temporellement et géographiquement). Si on avait été copines, je te l’aurais dit moi, que c’était une idée moisie ! Je te l’aurais dit qu’à tout miser sur ton physique, tu t’emprisonnerais dans une image de poupée gonflée. Je t’aurais prévenue que ton corps s’interposerait toujours entre les gens et toi, qu’il prendrait toute la place. Je t’aurais prédit que tout le monde trébucherait sur ces seins hypnotiques et qu’au lieu de t’aimer, on allait te prendre pour la reine des connes. Je t’aurais dit de laisser tomber et de trouver un autre moyen d’être au monde.

C’est trop tard maintenant ! C’est trop tard pour t’empêcher de faire la bêtise de ta vie. Mais je ne laisse pas tout tomber. Je vais te donner un peu d’amour, Pamela (c’est déjà ça et ça fait du bien, tu vas voir).
J’ai cousu une robe pour toi. Enfin non, j’ai cousu une robe pour moi en ton honneur à toi. Le modèle s’appelle Pam et je SAIS que c’est pour te rendre hommage que la marque Fiat Lux a ainsi nommé son premier patron.

Je le sais parce que Pam est le fruit du travail de ma copine Bérengère, grande spécialiste des séries télé (ses parents étaient des gens détendus aussi)(du coup, elle connaît même des séries qui datent d’avant sa naissance) et qui œuvre derrière Fiat Lux.

J’ai officiellement testé Pam en Juin. J’avais vu le prototype de la version robe, rouge comme le maillot de C. J. et depuis, j’avais follement envie de me frotter à ce patron.
Pam, c’est une robe, ou un débardeur ou une jupe (open bar, quoi). Moi je ne voyais que la robe. Et je l’ai cousue en deux soirées exactement (record absolu en Tasticottie pour un vêtement adulte).

Dès qu’il a été question de coudre une robe débardeur, j’ai arrêté mon choix sur un jersey rayé de mon stock. Je n’en avais hélas qu’un petit mètre 50 que j’ai exploité au maximum mais qui me laisse une impression de trop court (je me demande si je ne vais pas rajouter une bande de bleu marine en bas).

Alors évidemment, la question des raccords s’est posée. Ou plutôt non, elle ne s’est pas posée puisqu’il était hors de question de ne pas les faire. Les raccords, c’est un engrenage. Tant que tu n’y fais pas attention, ce n’est pas grave mais dès que tu t’y mets, tu ne peux plus ne pas les faire. Et donc, j’ai soigné mes raccords de rayures. Mais pas d’inquiétude coupinette (oui, coupine, je m’adresse à nouveau à toi, je ne crois pas que la couture intéresse Pamela)( c’est complètement nul, ce que je viens d’écrire, je ne sais rien de tes centres d’intérêts, Pamela)(bon, tu peux te considérer comme ma coupinette, Pamela, ça ne me dérange pas), pas d’inquiétude disais-je donc à propos de mes raccords, je n’ai pas souffert.

Vois-tu, j’ai coupé mon tissu en simple épaisseur. J’ai tracé mon droit-fil. J’ai collé mon demi-patron du devant le long de mon trait et j’ai tracé sur le tissu. Ensuite, j’ai retourné mon demi-patron et je l’ai positionné de l’autre côté de mon trait vertical avant de tracer, ce qui m’a permis d’obtenir des rayures rigoureusement horizontales. J’ai fait pareil pour le dos, en faisant bien attention à aligner les rayures et l’affaire était dans le sac.

Pam a été conçue pour être cousue à la machine à coudre classique avec finitions à l’aiguille double (efficace et jolie). Du coup, tout le monde peut la coudre, pas besoin de surjeteuse. Ca m’a arrangée pour mes rayures. Pour qu’elles restent bien alignées lors de l’étape couture à la machine, j’ai blindé Pam d’épingles. J’en ai pratiquement mise une à chaque changement de couleur.
Ca valait le coup non ?

Ce qui m’a mise en joie, chez Pam, c’est qu’elle est ajustée au niveau de la poitrine et qu’en dessous, elle suit les courbes du corps sans pour autant les coller. Il y a d’ailleurs une couture dans le dos dont je me suis demandé à quoi elle servait jusqu’à ce que j’essaie ma robe et que je comprenne que c’est pour qu’elle tombe mieux dans mon dos (bien qu’il reste quelques plis rapport à la cambrure dont la nature m’a si généreusement pourvue). Du coup, j’ai l’impression d’être une naïade quand je porte ma Pam. Je me sens belle et je pense à toi Pamela.

Le décolleté de Pam (la robe hein, pas la Californienne) me plaît beaucoup. Il est soutif-compatible (on ne voit même pas les bretelles), il ne fait pas un pli et il flatte ma triste poitrine (éprouvée par l’âge et les enfants et plus loin que jamais de la tienne, Pamela).

Ce décolleté me donne envie de tester la version débardeur très prochainement. Et puis de me refaire une robe, puisque mon jersey bouloche un peu aux endroits où mes bras frottent. Cette fois, je lui rajouterai une bonne dizaine de centimètres et je ferai la coulisse, je pense.

Tu vois Pamela, j’ai beaucoup pensé à toi. Et ne t’inquiète pas, je ne vais pas te laisser tomber, je n’en ai pas fini avec ce patron.

Avec toute ma tendresse, je te dédie donc ma robe et toutes mes futures réalisations avec Pam.

(Bon il paraît qu’en ce moment, tu es avec un petit jeune tout fringuant et que niveau tendresse, ça va. Tu as raison, profite un peu, tu le mérites).

17 thoughts on “Pamela et moi

  1. Cette robe te va parfaitement, surtout ne lui ajoute rien ! Et le texte, j’ai itoujours autant plaisir à te lire et à sourire. C’est tellement agréable de rire et d’avoir des commentaires fiables de concert.
    Belle journée et au plaisir de te lire.

  2. Décidément, ton phrasé fait de toute présentation couturesque un bon moment de lecture, j’apprécie beaucoup! Et puis… cette robe Pam (et ces raccords, wouah, bravo, tu m’épates), vraiment chouette et pratique pratique je pense, non? Je la retiens (plutôt pour l’an prochain, on va rentrer en mode « rentrée », justement, par ici…), merci!

  3. Moi aussi je l’ai détesté, ainsi que toutes les autres ..ma mère était plus que détendue concernant les séries…Je pense même que la téloche était sa baby sitter préférée ( surtout la moins cher et la plus disponible)..et curieusement j’ai toujours adoré J. Birkin !!
    Avec les années, je n’ai pas pris de poitrine (ni de fesses d’ailleurs) mais j’ai cessé de détester Pamela ainsi que les autres..je suis amour à présent et vit très bien le fait de ne jamais trouver de soutien gorge à ma taille ..c’est bon de vieillir !!
    Bravo pour tes raccords !! trrop classes !!! Ici je reprends tout doucement la couture, du moins j’ai installé les machines hum hum !!

    1. Ah Edwige! J’aime toujours beaucoup lire tes commentaires!
      Chez nous, la télé c’était culturel: ça fait partie du fonctionnement de la maison (et il y a effectivement ce petit côté baby-sitter qui a du aider mes parents à se détendre encore plus:).
      Merci pour les raccords!
      Curieusement, moi j’ai du mal à me remettre à coudre. Je guette l’envie. Peut-être à la rentrée?

  4. Elle est CA-NON cette Pam, et franchement tu n’as rien à envier à la Blonde paske toi au moins t’es belle au naturel, pas besoin d’artifices siliconés.
    Moi qui cherchais un patron de débardeur sympa à transformer en robe, là c’est PILE POIL ce dont j’avasi envie

  5. J’adore lire tes articles qui me font voyager dans le temps et dans l’imaginaire. On en oublierait presque que c’est un blog de couture. Sacrée Pam elle n’aurait jamais pensé déclencher autant de réflexions couturistiques !
    Cela dit, ta réalisation est top, avec des raccords de malade. Je n’ai encore jamais osé tenter la robe en jersey par peur de trop mouler mes rondeurs, bourrelets et autres postérieurs. Cette robe te va parfaitement à toi, comme quoi c’est parfois mieux d’avoir moins de monde au balcon…

  6. Merci beaucoup Fanfreluche!
    Oui c’est vrai qu’avec moins de monde, parfois la fête est plus folle. Ce qu’il y a de bien aussi avec cette robe, c’est qu’elle ne moule rien de fâcheux à partir de sous la poitrine. Elle pourrait peut-être te convenir du coup?

  7. Ta robe est très jolie, avec ses beaux raccords et son tombé parfait !

    Quant à cette pauvre Pam’, la lecture de ton biller m’a rappelé une de ses consoeurs, Nicole Eggert, qui s’est fait refaire 5 ou 6 fois la poitrine pour finir dans l’émission de TV réalité Chirurgie à tout prix, comme cas désespéré…

  8. Elle est superbe cette robe et te va drôlement bien!! Etant moins même un maigre bonnet B j’ai lu avec délices tes digressions malibuesques!! excellent!!!
    Comme ma consoeur Fanfreluche (on partage beaucoup de chose mais pas la taille de bonnet!) j’ai toujours des appréhensions face aux robes en jersey, peur que ça moule un peu trop les bourrelets et autres petites imperfections qui nous affectent nous les VRAIES poulettes!! Mais ta robe donne vraiment envie.. affaire peut-être à suivre.

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